Un Monde de Marins

Quand le peintre regardait la mer, c’était un regard de connaisseur qu’il posait sur elle car il l’a cotoyée, il l’a tutoyée. Il la connaissait bien pour avoir été marin jadis.

La Normandie, avec ses terres, s’ouvre sur la mer. Son atmosphère et sa lumière ont exercé sur lui, comme sur beaucoup d’artistes, un attrait irrésistible.

Le littoral du Pays de Caux déroule sur des kilomètres ses falaises de craie qui sont sans cesse érodées par les assauts de la mer. Le long de cette côte d’albâtre, s’égrènent des ports où il s’est attardé. Là aussi, avant lui, les impressionnistes ont popularisé par leurs toiles les bourgs bordant les falaises. Séduit par le pittoresque de la région, il observait le rude labeur des pêcheurs, il écoutait les gens du pays. Ainsi, il a su allier à sa poésie des couleurs au gré de sa palette en exprimant pleinement sa compassion et son amour pour les êtres et le paysage qui les entoure.

Néanmoins, au cours d’un vernissage, il confiait à ses invités dans quelles conditions il aimait travailler. La solitude, le repli dans son atelier lui étaient indispensables. A la base, un croquis et ensuite l’apport de l’artiste. « Il ne faut pas être tributaire de la nature », assurait-il.

La variété et la qualité de ses œuvres étonnent toujours, il ne s’est jamais figé. R.Saunier écrivait dans la presse : « Gaston Alexandre n’appartient pas à proprement parler à une « école » et n’en subit pas la rigidité pour tout ce qui est de la continuité dans un genre spécifique. Bien au contraire, il peint suivant l’inspiration du moment, la diversité des impressions ou des sentiments qu’il éprouve, quand il est devant son chevalet, l’amène à traiter sa pâte et à utiliser ses coloris dans des styles multipliés.

Un peu bohème, ce membre du Salon de Rouen dispose d’une palette étonnante pour toucher sa toile ; on serait tenté d’écrire pour toucher à tout ce qui le tente dans l’expression picturale, tantôt à la manière classique ou encore impressionniste, tantôt à grands traits comme Jef Friboulet, quand il n’aborde pas aux rivages de la peinture abstraite… »
Le figuratif s’estompe dans « Les Régates », « Les Voiliers » et « Grosses Vagues » où seuls le mouvement et la ligne subsistent.

Héquet écrit dans la presse : « Alexandre, c’est Alexandre ramassant son « expression » suivant une humeur qu’il admet volontiers changeante. Jouant avec liberté des formes, il a le vocabulaire, l’aisance d’un peintre de classe nationale. Son œuvre allant du surréalisme à l’expressionisme est parfaite et mérite une large audience ».

Il chérissait Honfleur comme tant de peintres et d’écrivains et il s’est plu à immortaliser un thème favori : la Lieutenance et son vieux bassin, dans une série de tableaux, tous d’une facture de maître.

Les tableaux constituant la collection « Un monde de Marins » commentent à eux seuls la vie qui passe et les marées qui succèdent aux marées.